Chronique d’un architecte Exposeimage

L’architecte André Bourassa (Bourassa Gaudreau & Associés architectes), membre de notre comité consultatif, reconnu pour ses propos lucides, parfois tranchés, nous partage quelques réflexions. À réfléchir en cette période hors du temps.

1- Penser à une filière courte pour les masques et la nourriture, mais faire voyager des matériaux d’un bout à l’autre de la planète, souvent pour un effet esthétique (les granits africains ou les fonds de rivière du Brésil sont du plus bel effet, ma chère). La pertinence du biosourcé est plus grande que jamais. Des taxes plus importantes devraient-elles s’appliquer aux transports frivoles ?

2- La réflexion sur le temps que ça prend pour faire son pain (ou ses brioches à la cannelle…) ne s’appliquerait-elle pas au temps que ça prend pour concevoir des projets, autrement que dans des charrettes-spectacles…

3- Dans les nouveaux projets d’école (et tant mieux qu’on y pense) qui pensera à l’approvisionnement pour le service alimentaire ? Je partage l’anecdote suivante : lors d’un passage à Montréal, nous avons profité du déplacement pour visiter le musée Pointe-à-Callières. Tant qu’à faire, j’ai suggéré de casser la croûte dans le seul resto ouvert dans les installations du Vieux-Port en ce jour d’hiver, soit celui du Centre des sciences. Je me suis dit qu’en mangeant sur place, nous éviterions emballages et rebuts. Coup d’œil à la photo ci-dessous !

J’en fus stupéfait, d’autant qu’il y a une autorité locale (la Société du Vieux-Port ou la Ville de Montréal ou les deux) qui pourrait se coordonner pour installer ce qu’il faut pour laver la vaisselle. C’est une évidence pour plusieurs que la vraie vaisselle coûte trop cher à laver. Évident si on n’a pas la plonge qu’il faut !

Mon lien avec les écoles : cette décision doit être prise en haut lieu pour éviter que dans les somptueuses nouvelles écoles, on en soit encore à produire des montagnes de déchets, qui plus est des plastiques qui ont peu de valeur sur le marché du recyclage.

Est-ce absolument utopique de penser que des serres éducatives chauffées avec les surplus d’Hydro-Québec pourraient en partie servir à éduquer et à nourrir les occupants ? Un esprit sain dans un corps sain, n’est-ce pas ? On peut notamment s’inspirer d’une initiative danoise de la New Island Brygge School, un projet de C.F. Møller Architects. Ces nouvelles écoles à la lumière de ce que nous vivons peuvent devenir une occasion des plus intéressantes.

Je rappelle aussi à quel point on a décrié la « formation domestique », pour dénoncer bien évidemment que les femmes n’ont pas à y être confinées, plutôt que d’en garder l’essentiel au bénéfice des garçons et des filles. Savoir entretenir sa maisonnée, de façon saine et organisée, ce n’est pas futile du tout. Étant d’une famille de gars et d’une seule fille, nous avons toujours entendu notre mère qui souhaitait que les gars sachent se débrouiller dans une maison, et pas seulement « la » fille.

4- Pour demeurer dans la sphère scolaire et alimentaire, voici ci-dessous la photo d’un gymnase que nous avons réalisé.

Un investissement important pour une toute petite école. En fait, le gymnase est plus gros que l’école, et ça pour faire bouger les élèves. Tout à fait d’accord ! La commission scolaire a de plus une approche énergétique et environnementale progressiste. Mais si on fait cela pour bouger, est-ce que ça ne vaudrait pas la peine de penser aussi à des aliments de qualité ? Bref, la volonté politique demeure essentielle. Je pense à toutes ces écoles au toit plat de la région montréalaise qui pourrait considérer l’installation de serres sur les toits. Oui, c’est une expertise à développer et à consolider, mais pourquoi pas ? Sélectionner les structures qui s’y prêtent le mieux. Où il y a une serre, il n’y a pas d’accumulation de neige.

5- Idem pour le télétravail et les moyens de communication : penser à effectuer une rotation des jours d’école ou des jours au bureau, une journée de temps à autre plus loin du trafic, avec du matériel à transmettre à distance… c’est loin de l’architecture ? Mettre en place ces moyens et pratiques pourrait permettre de garder cette machine bien huilée et davantage prête à se mettre en action en cas d’urgence. Il faudrait cependant accélérer le déploiement de l’accès à des connexions internet haute vitesse sur tout le territoire…

6- Dans un contexte de pénurie de personnel, penser à des bâtiments qui requièrent moins d’entretien ? Ne pas oublier que les structures apparentes et les fenêtres inaccessibles s’empoussièrent et se salissent, et qu’il faut trouver des gens pour les nettoyer.

7- Si Airbus pense à des traversées de l’Atlantique moins énergivores, nous ne serions pas en mesure de penser à des écoles plus écoénergétiques ? Voyons donc !

Désolé de vous accaparer encore. Qu’en restera-t-il ? Ce qui était impossible hier, peut être tout-à-fait possible aujourd’hui. Ce qui était possible hier pourrait parfois l’être moins aujourd’hui…

 


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