Augmentation de la température de 1,5 °C ou 2 °C, et alors ? Climate & Clean Air Coalition / Istock-Sarkophoto

Processus partiellement irréversible, les effets délétères du dérèglement climatique sur les populations et sur les infrastructures sont déjà manifestes et multiples. La seule option est l'adaptation

On apprend souvent par les médias la mise en place de groupes d’experts en adaptation aux changements climatiques par des institutions nationales ou internationales. Ce changement climatique, ou ce dérèglement climatique, s’inscrit dans ce qu’on appelle l’« urgence climatique »,car les effets délétères sur les populations et sur les infrastructures sont déjà manifestes et multiples.

Cette urgence climatique est née de l’accroissement de la température moyenne de la Terre (TMT) avec la multiplication d’événements extrêmes comme les feux de forêt, le verglas, les inondations, etc. Ce sont donc de belles initiatives gouvernementales, car il n’y a plus d’autres options qui s’offrent à nous. Il faut réfléchir à la mise en place de stratégies d’adaptation, mais surtout s’assurer de leurs applications concrètes. Il en existe déjà de nombreuses, mais je ne vais pas les énumérer dans cet article.

La seule option

La seule option qui s’offre à nous est donc l’adaptation, pour la simple et bonne raison – qui n’est pas souvent suffisamment mentionnée de façon pédagogique – que le dérèglement climatique est un processus déjà en cours et partiellement irréversible. C’est-à-dire que même si, au lendemain de la publication de cet article, on fermait tous les robinets de production de gaz à effet de serre (GES) responsables de l’accroissement de la TMT, les conséquences ou les impacts de cet accroissement se poursuivraient encore pendant des milliers d’années – en tout cas en ce qui concerne l’élévation du niveau des océans, la fonte des glaces polaires et du pergélisol1. Autrement dit, notre génération ainsi que celle de nos enfants, de nos petits-enfants et même celle de nos arrière-petits-enfants ne connaîtront plus jamais la TMT de l’an 1900 (l’ère préindustrielle). 

Attention, ce n’est pas une raison pour ne pas encourager les gouvernements et la société à réduire ces émissions quotidiennement et collectivement, car un dérèglement climatique trop fort éliminerait toute chance d’adaptation.

Évolution de la température moyenne de la planète

La température moyenne de la planète a augmenté d’environ 1,2 °C depuis 1880. Les variations interannuelles sont dues à des facteurs naturels, surtout des oscillations océaniques. La tendance à la hausse depuis 1950 est due à l’intensification de l’effet de serre par nos émissions de gaz à effet de serre. Cet indicateur, baptisé Tg (Temperature globe), est exprimé en écart par rapport à la moyenne climatique sur la période 1880 à 1920. Pour calculer la température planétaire, les mesures thermométriques (un mètre au-dessus des sols et l’eau de surface pour les océans) sont placées sur une grille dont les mailles font 2° x 2° en latitude et longitude (environ 100 km sur 100 km à l’équateur). Chaque maille est représentée par un seul chiffre, puis le total est divisé par le nombre de mailles. On trouve alors un seul chiffre, qui est la température moyenne. L’incertitude de ce chiffre est de 0,15 °C dans la série de la NASA pour 1880 et de 0,05 °C aujourd’hui. Source des données : Université Columbia de New York et Goddard Institute for Space Studies (NASA). – Source : pacte-climat.eu

 

Mais au fait, qu’est-ce que la TMT, dont l’augmentation de 1,5 ou de 2 degrés serait responsable de cette urgence climatique mettant en péril notre survie sur cette belle planète bleue ? La réponse à cette question me paraît essentielle dans un exercice de pédagogie au Québec et dans le monde, car beaucoup de personnes en ont entendu parler. Mais bien souvent, elles ne savent pas réellement de quoi il s’agit. Elles ont peut-être éventuellement compris qu’il y a un problème avec le climat, mais elles n’ont pas suffisamment compris comment le gérer. Au nombre de ces personnes, j’inclus les politiques et certains gestionnaires d’industries dont les sites de production sont des foyers ou des robinets de production de GES.

La température

Revenons au sujet essentiel de cette publication : la température. La température est quelque chose qui ne parle qu’à nos sens. En écrivant cet article dans mon bureau du sous-sol de ma maison, je ressentais une température. Et cette température pouvait varier d’une pièce à l’autre de ma maison. Je ne suis pas capable de ressentir la température moyenne dans ma maison.

Quand les experts du climat disent qu’il y aura un accroissement de la TMT de 1,5 ou 2 degrés, ils utilisent une notion statistique qui nécessite un petit effort de pédagogie.

À Montréal, entre l’été et l’hiver à un endroit, l’écart de température peut dépasser 30 degrés. Mais personne n’en est mort. Nous sommes très loin alors des écarts moyens de 1,5 ou 2 degrés sur la TMT.

Pour encore tenter d’expliquer cette notion de moyenne, je propose un autre exemple. Un sondage mené par une compagnie porte sur le degré de sentiment d’appartenance. Quand la note d’évaluation sur ce sujet pour un employé varie de 2 points d’une année à l’autre, ça ne donne pas vraiment objet à des analyses constructives fondamentales sur la compagnie. Ce n’est pas du tout la même chose quand la moyenne des évaluations faite par la compagnie sur tous les employés varie de 2 points sur la même période. En effet, une moyenne sur un grand effectif varie moins que les valeurs individuelles et plus l’effectif est élevé, plus la moyenne est stable.

Une moyenne est un baromètre statistique simple, mais il faut très bien la comprendre.

 

Évolution de la banquise article en septembre

(1980 en blanc / 2019 hachuré)

Source des données : Université Columbia de New York et Goddard Institute for Space Studies (NASA). – Source : pacte-climat.eu

 

Pour conclure, la formulation la plus adéquate serait de se référer à une « dérive climatique ». Et pour ralentir cette dérive climatique, il est impératif de bien comprendre cette fameuse TMT, que nous ne ressentons pas sur notre peau, mais dont l’élévation aura des répercussions néfastes sur nos vies pendant de nombreuses années. Cela nécessite une vigilance collective et individuelle, soutenue par l’expertise pédagogique des chercheurs, ainsi qu’un véritable engagement des politiques.

Note

1 C’est le sol gelé en permanence depuis de nombreuses années dans les régions nordiques du Québec. Sa fonte va libérer des GES, mais aussi affecter de nombreuses infrastructures (ex. : routes, aéroports dans le Nord).

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