Quant à savoir comment la conception collaborative améliore le projet, Rémy-Paul Laporte donne l’exemple du Stade de soccer. « Le PCI a permis de bonifier le projet. On a fait un changement radical en mettant l’entrée à l’étage plutôt qu’au rez-de-chaussée. » Il estime que pour le Stade de soccer et le Théâtre de Verdure, « le PCI s’est révélé une approche gagnante avec la réalisation de projets de qualité bien reçus du public ». Les avantages du PCI se manifestent aussi lors de la réalisation du projet. « Le PCI peut apporter une meilleure qualité, mais surtout permettre de terminer le projet dans l’échéancier et le budget prévus », précise Federico Pensa, directeur BIM-VDC chez Magil Construction.
Le Stade de soccer et le Théâtre de Verdure (Montréal) ont été réalisés selon le PCI.
Vision nuancée
Prudente, Marie-Ève Milot, architecte et coach certifié, directrice Expérience collaborative à L’Atelier Urbain, préfère voir dans le PCI « un potentiel pour réaliser des projets d’architecture de plus grande qualité ». Encore faut-il saisir ce potentiel. En ouverture de la deuxième partie du séminaire, Mario Bourgault, professeur au Département de mathématiques et de génie industriel de Polytechnique Montréal, rappelait que, « historiquement, ce sont les professionnels intéressés par le développement durable qui ont été à l’origine de cette pensée de travail intégré ». Une meilleure concertation doit en effet permettre d’identifier des solutions respectueuses de l’environnement. Forte de son expérience en analyse de cycle de vie (ACV) appliquée au bâtiment, Leyla Lardja suggérait déjà, en 1917, d’intégrer l’ACV comme outil de décision dans le PCI. « Le PCI offre une belle occasion pour l’amélioration environnementale de la qualité de projet en offrant à l’ACV la possibilité de devenir un outil d’arbitrage », précise-t-elle. Après avoir vécu le PCI de l’intérieur, elle constate les enjeux et les difficultés à intégrer l’ACV au PCI. « Les considérations économiques et fonctionnelles l’emportent toujours, faute de données pour soutenir les stratégies environnementales efficientes. J’ai pu observer qu’on est encore dans cette logique d’instrumentalisation des outils analytiques comme outils de validation de décisions et non pas comme outils pour prendre des décisions », regrette-t-elle.
Federico Pensa apporte aussi son bémol quant à la qualité accrue d’un projet conçu en PCI et souligne que la qualité d’un projet dépend du mandat du client et des critères d’octroi du contrat. « On ne fait pas de beaux projets si personne ne paye, dit-il. Dans le cas du Centre de réadaptation pour jeunes en difficulté d’apprentissage de Sainte-Thérèse, le contrat venait avec des critères de qualité importants, mais ce n’est pas toujours le cas. On s’est associé avec des firmes d’ingénierie, d’architectes et des sous-traitants reconnus pour faire de la qualité et on avait un budget en conséquence pour livrer le projet de qualité. »
Mesurer le bénéfice du PCI
Si Rémy-Paul Laporte estime que le Théâtre de Verdure et le Stade de soccer sont des projets de qualité, il reconnaît également que « la question demeure de savoir quelle part le PCI a vraiment apportée aux projets ». Après tout, sans le PCI, le Stade de soccer aurait peut-être obtenu la même certification LEED et la même approbation du public. Comment savoir également si le PCI a amélioré le bon déroulement du chantier ? « Il y a toujours des situations ou des problématiques qui n’ont rien à voir avec le mode de réalisation d’un projet, reconnaît Julie D. Gagnon, directrice exécutive, projets en modes alternatifs, à la Société québécoise des infrastructures (SQI). On aimerait pouvoir comparer objectivement les modes de réalisation et leur impact sur le respect de l’échéancier. » C’est pourquoi la SQI développe des indicateurs pour évaluer la collaboration et améliorer l’application du PCI.
Le PCI est un processus complexe, appliqué selon un mode opératoire encore mal défini, donnant des résultats encore difficilement quantifiables, et qui ne semble pas exploité à son plein potentiel. Mais le concept vaut le coup d’être expérimenté, croit Marie-Ève Milot. « C’est en l’essayant qu’on va vraiment réussir à faire des projets d’architecture de qualité et durables. »