Par contre, à la différence des éléments structuraux, la notion de combustibilité du matériau (combustible ou incombustible) n’est pas la propriété intrinsèque principalement utilisée par le CNBC pour règlementer l’usage de ces revêtements intérieurs dans les bâtiments. Ce sont plutôt les concepts d’indice de propagation de la flamme (IPF) et d’indice de dégagement des fumées (IDF) qui servent de critères de performance incendie associés à l’utilisation des revêtements intérieurs de finition. De façon simplifiée, le premier a pour but de limiter la vitesse à laquelle un incendie peut se développer et potentiellement se propager à l’intérieur d’un bâtiment au-delà de son point d’origine, alors que le second vise à faciliter l’évacuation sécuritaire des occupants.
Qu’est-ce que l’IPF ?
L’indice de propagation de la flamme (IPF) est une propriété qui permet de caractériser le potentiel avec lequel un matériau de revêtement intérieur pourrait contribuer à propager un incendie au-delà de son point d’origine. Au Canada, le CNBC exige que l’IPF d’un matériau soit déterminé au moyen d’au moins trois essais réalisés conformément à la norme canadienne CAN/ULC-S102 « Caractéristiques de combustion superficielle des matériaux de construction et assemblages ».
Cette méthode d’essai s’effectue en utilisant le tunnel de Steiner. Le matériau pour lequel on souhaite obtenir l’IPF est placé à l’horizontal au plafond d’un tunnel mesurant 457 mm (18 po) de largeur x 305 mm (12 po) de hauteur x 7,3 m (24 pi) de longueur (figure 1). Une fois l’échantillon placé à l’intérieur du tunnel, ce dernier est ensuite fermé hermétiquement. À l’entrée du tunnel, deux brûleurs au gaz produisent une flamme et un système de ventilation assure une turbulence à l’intérieur du tunnel afin de faciliter la propagation de la flamme. L’intensité de la flamme et le débit d’air sont normalisés et maintenus constants tout au long de la durée de l’essai de dix minutes. La distance de progression de la flamme à la surface de l’échantillon est observée et enregistrée à intervalles réguliers pendant toute la période d’essai. De plus, un photomètre installé dans le conduit d’évacuation à la sortie du tunnel mesure et enregistre l’opacité des fumées tout au long de l’essai dans le but de déterminer l’IDF.
Figure 1 - Tunnel de Steiner (source : www.ul.com)
La valeur de l’indice de propagation de la flamme (IPF) d’un matériau est ensuite calculée en fonction des mesures de progression de la flamme enregistrées lors de l’essai décrit précédemment. La valeur ainsi attribuée est adimensionnelle, c’est-à-dire qu’elle ne possède aucune unité de mesure. Il s’agit simplement d’une échelle comparative entre les différents matériaux déterminée à partir des résultats d’essai de deux matériaux de référence, soit le chêne rouge et le fibrociment. Le chêne rouge s’est vu attribué arbitrairement une valeur d’IPF de 100, alors que le fibrociment, un matériau inorganique, possède un IPF de 0. Les matériaux mis à l’essai se voient donc attribuer une valeur d’IPF en fonction des données enregistrées pendant l’essai, qui sont par la suite comparées à celles obtenues pour les deux matériaux de références.
CAN/ULC-S102 vs ASTM E84
Les valeurs de l’IPF publiées par certains fabricants de revêtements de finition, ou par certains organismes ou associations de produits, ont parfois été obtenues conformément à l’essai de la norme américaine ASTM E84 (ou UL 723) « Standard Test Method for Surface Burning Characteristics of Building Materials », plutôt que selon la norme CAN/ULC-S102.
Bien que très similaires, ces deux essais ne sont pas identiques, ni comparables. Les deux essais sont réalisés au moyen du tunnel de Steiner, dont les dimensions, les conditions d’essai (intensité de la flamme et débit d’air) et le montage de l’échantillon sont tous identiques. Cependant, sans trop entrer dans les détails, disons que la paroi des murs à l’intérieur du tunnel diffère légèrement entre les deux essais, ce qui influence la turbulence de l’air à l’intérieur du tunnel. De plus, au Canada, les valeurs de l’IPF d’un matériau doivent être obtenues en faisant la moyenne de trois essais conformes à CAN/ULC-S102 alors que chez nos voisins du sud, un seul essai selon ASTM E84 suffit pour déterminer la valeur de l’IPF d’un produit. Finalement, la méthode de calcul utilisée pour attribuer la valeur de l’IPF en fonction des résultats de l’essai diffère entre les deux normes. Les valeurs calculées avec l’essai ASTM sont habituellement inférieures à celles calculées de l’essai ULC.
Les professionnels canadiens doivent donc faire preuve de vigilance lorsqu’ils décident d’utiliser pour l’un de leurs projets des valeurs de l’IPF d’un matériau provenant de la norme ASTM E84. Ils devraient s’assurer de la répétabilité du résultat puisque que la valeur américaine provient d’un seul et unique essai. Ils doivent également demander une acceptation (ex : mesure différente) du résultat d’essai réalisé selon ASTM E84 par les autorités ayant juridiction.
Il est de la responsabilité des fournisseurs d’évaluer leurs produits conformément aux normes applicables (ex : CAN/ULC-S102 pour une utilisation au Canada) et de fournir ces preuves justificatives aux professionnels et concepteurs de bâtiments. En l’absence de résultats d’essais, les professionnels et concepteurs peuvent exiger de réaliser des essais afin de démontrer la conformité d’un produit.
Siège social de Creaform – Photo : Stéphane Groleau
Les exigences du Code
Les exigences du CNBC concernant les valeurs de l’IPF dépendent de plusieurs facteurs. D’abord, elles peuvent varier selon l’emplacement du revêtement de finition, à savoir s’il est installé au plafond, sur les murs ou au plancher. Les exigences varient également en fonction du classement selon l’usage du bâtiment, de la présence ou non d’un système de gicleurs automatiques, et de l’endroit à l’intérieur du bâtiment : pièces, salles de bain, corridors, halls d’entrée, issues, vides techniques, etc. Il y a essentiellement trois catégories pour classifier les revêtements intérieurs dans le CNBC. La plus restrictive comporte les produits ayant une valeur de l’IPF entre 0 et 25 inclusivement, la deuxième inclut les revêtements ayant un IPF de 26 à 75, alors que la troisième s’applique aux matériaux ayant une valeur de l’IPF au-delà de 75.