Design graphique – Douze visions sur la regénération d’une profession

Les enjeux géopolitiques, technologiques et environnementaux, ainsi que l’arrivée en force de l’IA et la multiplication des plateformes de réseaux sociaux ont évidemment transformé les diverses disciplines en design graphique. Dans quelle mesure peut-on envisager une carrière dans ce domaine ; est-il plus difficile de fidéliser et même d’accroître sa clientèle depuis l’instauration récente du télétravail ?

Sans vouloir prétendre être exhaustif, cet article laisse la parole à des praticiens aux profils et expériences variés, qu’ils soient en agence ou travailleurs indépendants et actifs dans des domaines tels que la gestion de marques, l’édition et le design corporatif.

Karl-Frédéric Anctil est directeur de création et fondateur de Featuring, une agence basée à Montréal. À la suite d’une récente réflexion, il admet que leur taux horaire reste inchangé depuis plusieurs années, malgré la pression exercée par les exigences accrues des variables, des frais d’exploitation et des salaires qui ont augmenté en flèche. « Pour des appels d’offres, nous donnons des livrables très complets, mais certains de nos compétiteurs offrent souvent des propositions moins chères, en offrant moins au client en fin de compte, explique-t-il.

Karl-Frédéric Anctil – Photo : JS Dénommé

 

« Notre travail, poursuit-il, et il est important de le rappeler, c’est d’offrir des services-conseils et de proposer des stratégies de positionnement uniques, afin d’offrir aussi une plus-value en fin de compte… Nous restons des professionnels de la communication avant tout. Bien que les outils nous permettent de produire certaines tâches plus rapidement, le défi est de continuer à donner le même niveau de qualité à un projet dans sa réflexion et son impact communicationnel. »

Stéphane Huot est designer graphique indépendant et chargé de cours à l’École de design de l’UQAM. En plus d’avoir reçu de nombreux prix lors de concours nationaux et internationaux, plusieurs de ses affiches font partie de collections importantes, tant chez nous qu’à travers le monde. S’il croit que ce n’est pas aussi facile qu’auparavant de gagner sa vie dans ce domaine, il se rappelle : « À mes débuts, le marché du travail était principalement orienté vers les grandes firmes qui réalisaient la majorité des mandats importants. Les clients y consacraient généralement des budgets en communication bien plus substantiels qu’aujourd’hui, ce qui permettait une plus grande marge de manœuvre créative et stratégique. »

Le marché s’est fragmenté en une multitude de petites firmes, avec une croissance marquée du nombre de travailleurs autonomes aux parcours scolaires et aux expériences pratiques très variables. Cette diversification a entraîné une baisse significative des honoraires, et il serait pertinent de disposer d’outils offrant des repères clairs sur les échelles de salaires et les honoraires selon les types de projets. À ma connaissance, la seule référence disponible en ce sens est le rapport annuel publié par la RGD1, qui fournit des données détaillées pour l’ensemble du Canada.

Stéphane Huot – Photo : Gilbert Duclos

 

« En diversifiant les types de projets, ajoute Stéphane, je peux à la fois accepter des mandats avec des budgets intéressants et choisir des projets moins lucratifs, mais particulièrement stimulants sur le plan créatif. L’objectif ultime demeure de bien gagner sa vie, tout en prenant plaisir à exercer son métier. »

Karl-Frédéric apporte une nuance intéressante. « Selon moi, cette problématique de budgets qui stagnent, et cela depuis dix à quinze ans, est plutôt spécifique au Québec. Les taux horaires et les budgets des autres provinces et ceux aux É.-U. sont généralement supérieurs ; mais la situation est pire pour les producteurs Web qui font partie d’un marché encore plus compétitif. »

Des outils trop performants ?

Louis Brunetlle – Photo : Parallèle

 

Selon Louis Brunelle, président et directeur de création chez Parallèle, nous vivons actuellement une troisième révolution dans le milieu des communications. Nous serions passés de l’analogique au numérique et à la dématérialisation de toutes les étapes de conception et de production d’un projet. L’IA permet de créer des images fixes ou animées à partir d’une requête formée de mots et de phrases qui ouvrent ainsi un nouvel univers à toute personne ayant accès aux outils informatiques. « C’est déstabilisant pour les gens ayant connu toutes les difficultés à produire des images complexes, conceptuelles et stratégiques, dit-il, mais pour la génération qui s’en vient, ce sera normal de penser, de créer et de produire des messages avec des assistants robots. »

Robert Young – Photo : Peter Ng

 

Robert Young, enseignant au Collège Vanier, est un autre designer graphique d’expérience qui observe les effets de ces changements technologiques sur la pratique professionnelle. « Les nouvelles technologies ont mis un coffre d’outils très performants dans les mains des clients, ce qui était jadis réservé aux infographistes. Ces derniers s’occupaient, entre autres, de la production et des déclinaisons d’un concept, ce qui représente environ un tiers de la portion de notre gagne-pain. Mais les clients ne possèdent généralement pas les connaissances ni l’expertise pour élaborer les fondements ni l’argumentaire qui crée les balises d’une solide campagne de communication.

« Pour bien gagner sa vie en tant que designer graphique aujourd’hui, il faut concentrer ses efforts pour développer son expertise en conception et en stratégie de communication. Pour ce faire, on doit viser à maîtriser ses connaissances en sémiotique de l’image et être capable de développer les stratégies de positionnement d’une marque face à sa concurrence. Il m’est souvent arrivé de commencer une séance de remue-méninges avec un client en abordant ces divers aspects, bien avant de parler de design. »

Julie Royer

 

Julie Royer a travaillé en agence et en tant que travailleuse autonome avant de se consacrer à l’enseignement (graphisme au Cégep du Vieux Montréal, chargée de cours au baccalauréat en design graphique à l’Université Laval, Studio Montréal de l’École de design de Nantes Atlantique). Elle démontre, par ailleurs, comment l’intelligence artificielle permet une bonification du processus créatif qui peut aider à concevoir et à produire de meilleurs projets. « L’IA vient surtout changer la manière de travailler et… a présentement un rôle d’exécution. Ces outils extrêmement rapides et puissants peuvent ensuite nous être utiles dans notre processus créatif. Par exemple, lorsque nous avons une idée, nous pouvons tester rapidement si c’est plausible, si la forme convient, avant de nous lancer dans une production poussée qui prendra alors du temps. Je me souviens qu’au début de ma carrière, nous faisions des storyboards2 à la main pour présenter une idée de concept publicitaire au client, idée que le client avait souvent du mal à s’imaginer dans sa finalité. Maintenant, cette idée peut être présentée dans une forme presque finale pour permettre au client de mieux se projeter dans ce qui sera produit. »

Isabelle Toussaint

 

Isabelle Toussaint travaille aussi en tant que travailleuse autonome depuis trente-quatre ans. Elle n’a pas senti de son côté de baisse dans la demande de travail. Mais elle apporte un point intéressant en faisant référence à l’éthique professionnelle qu’un designer se doit de respecter. « Contrairement aux domaines de la photo et de l’illustration, le design graphique demeure relativement épargné – pour l’instant – par la menace de l’intelligence artificielle. S’il est vrai que l’IA peut générer un logo en quelques secondes, un designer graphique professionnel n’en retirera aucune satisfaction, sachant qu’il s’agit d’une solution “générique” qui peut être créée par n’importe qui. » Elle rappelle que la résultante appartient au domaine public et peut être reprise par n’importe qui et ajoute que le sentiment du devoir accompli est beaucoup plus puissant quand on conçoit soi-même ses images.

Robert Young croit pour sa part que ce sont davantage les designers graphiques qui travaillent dans des domaines comme l’emballage, le design d’exposition ou la signalétique qui tirent le mieux leur épingle du jeu. Mais, selon lui, il faut être réaliste : de nombreux professionnels auront moins de mandats et leur travail sera appelé à diminuer considérablement.

Télétravail, marketing et communication

À la lumière des points déjà abordés, il est loisible de se poser la question suivante : et qu’en est-il de la relation avec la clientèle ? Est-ce plus difficile d’accroître et de fidéliser ses relations d’affaires avec les contraintes qu’impose le travail à domicile ?

Stéphane Huotsoutient que, dans ce domaine, il est rare d’être engagé uniquement sur la base de nos compétences professionnelles. L’établissement d’un lien de confiance avec le client est souvent la première étape essentielle. Mais depuis la pandémie, il est devenu de plus en plus compliqué de rencontrer les gens en présentiel, ce qui rend la création de relations d’affaires solides et durables plus ardue.

Olivier Bouchard – Photo : Parallèle

 

Olivier Bouchard, associé et directeur de création à l’agence Parallèle, voit la situation d’un angle différent. À son avis, le télétravail a tout de même permis : 1) d’ouvrir le jeu et de collaborer avec des clients plus éloignés, 2) de réduire les déplacements, 3) de mettre en relation des gens qui se sentent parfois plus à l’aise de s’exprimer dans ce cadre-là. Il y a cependant un bémol. « Mais une distance s’installe. On collabore, oui, mais on tisse moins de liens. Et du côté de la création, ça change tout : la spontanéité, les regards, les silences, les réactions non verbales… C’est souvent là que naît l’étincelle. À l’écran, cette magie se perd. »

« Il y a de plus en plus d’écarts entre les différents praticiens, constate Robert Young, et on a besoin d’une symbiose de tous les travailleurs en communication, afin de faciliter l’efficacité et la fluidité du travail en équipe, entre les corps de métiers, que ce soient les entrepreneurs, les gens de marketing ou ceux de placement média. »

Yasminah Franklin

 

Yasminah Franklin concentre ses efforts depuis sept ans dans le domaine du « motion design ». Elle parle des possibilités que le télétravail lui a apportées. « Pour moi, au contraire, cela m’a permis d’accéder à une clientèle au-delà de mes adresses civiques immédiatement accessibles et a rendu les réunions et les livraisons plus flexibles en dehors des dynamiques traditionnelles. On peut ainsi éviter des démarches inutiles, si le dossier est bien géré. Cependant, nous devons toujours être attentifs à la question de savoir si le client avec lequel nous travaillons a une adresse civique identifiable ou non, car cela peut faire foi de sa capacité à payer nos services. »

Vanessa gaudreau – Photo : Affaires 55

 

Vanessa Gaudreaujumelle deux expertises en offrant des services comme designer graphique, mais aussi en tant que planificatrice événementielle. Elle mentionne avoir toujours travaillé avec des collaborateurs et des clients un peu partout dans la province, même bien avant la montée du télétravail. « À mes yeux, le bouche à oreille reste mon outil de promotion le plus puissant. C’est lui qui m’a apporté le plus de mandats, année après année, depuis plus de dix ans. Mon réseau s’est bâti naturellement, à travers les projets, les rencontres et les recommandations. Je pense que ça prouve qu’une présence constante en ligne n’est pas indispensable pour réussir, mais bien la qualité des relations et la fiabilité du service offert. »

Flexibilité et polyvalence dans la pratique

Melissa reis – Photo : Design Shopp

 

Melissa Reis est la fondatrice de Design Shopp International, une agence créative qui compte actuellement 20 employés appelés à travailler en synergie. Selon elle, le design graphique demanderait une approche créative polyvalente et une maîtrise des outils numériques combinées à une grande perspicacité. Les designers qui développent leur expertise dans les domaines numériques – UI/UX, Web, animation et surtout vidéo – sont ceux qui seront les plus demandés. Melissaencourage collègues et employés à développer des compétences parallèles, telles que la rédaction ou la photographie. « L’intelligence émotionnelle ainsi que l’écoute, l’empathie, la capacité d’adaptation et l’esprit de collaboration sont tout aussi importantes. Les designers d’aujourd’hui doivent nouer des liens avec les clients, comprendre leurs besoins réels et communiquer clairement leurs idées. »

 

Jeremy Fama – Photo : WebCakes

 

WebCakes est une entreprise qui, comme Design Shopp, se concentre notamment sur le développement Web. Son cofondateur etprésident, Jeremy Fama, fait part de son expérience en ces termes : « On s’attend désormais à ce qu’un designer ait une connaissance comparable de la viabilité aussi bien que de la rentabilité de l’architecture du site Web ou de l’application appartenant à son client. Si, auparavant, c’était une question de conception, suivie de son développement, nous passons aujourd’hui à une logistique de conception et de développement interdépendants.De plus, les logiciels de conception Web connaissent des mises à jour régulières et les designers doivent désormais développer très rapidement leurs compétences, en se familiarisant avec ces microchangements propres à chaque fonctionnalité, ce qui entraîne aussi des ajustements et de constantes modifications du travail de conception. »

Enfin, Jeremycroit que nous en sommes encore au stade où les images générées par l’intelligence artificielle ne peuvent être retenues, en raison de la méfiance générale du public et de la question des licences d’utilisation.

Quelles sont les perspectives de carrière ?

Les points de vue exprimés précédemment nous amènent à constater que tous ces changements représentent un défi de taille pour la formation générale.

À ce sujet, Melissa Reis mentionne qu’aujourd’hui, de nombreux jeunes designers intègrent ce secteur avec des compétences techniques, sans une compréhension approfondie de la raison d’être de leur métier. Ils peuvent créer de belles œuvres, mais passent fréquemment à côté de la stratégie et de l’histoire qu’ils doivent raconter. « Ce décalage vient souvent de la manière dont nous les préparons. Il existe un fossé entre les cours et la réalité du marché du travail. Ce qui manque, c’est une culture de la pensée critique et une exposition à la situation dans son ensemble : objectifs commerciaux, comportement des utilisateurs, communication et résultats. Il faut apprendre aux designers à commencer par le pourquoi, à élaborer une stratégie claire, puis à passer au visuel. En bref, il faut cesser de leur apprendre simplement à concevoir, mais leur apprendre d’abord à réfléchir. »

En plus de son expertise en tant que designer graphique, Robert Young enseigne aussi au collégial. D’après lui, la formation doit mettre davantage l’accent de façon générale sur les aspects conceptuel et communicationnel, la sémiotique, la recherche et les esquisses. De façon concrète, une maîtrise des mots-clés et des termes techniques, ainsi qu’une connaissance des caractéristiques visuelles, des époques et des styles, permettront une meilleure gestion des images générées entre autres par l’IA.

Tout comme Robert, Julie Royer enseigne le graphisme au Cégep du Vieux Montréal et elle est chargée de cours au baccalauréat en design graphique à l’Université Laval. « Lorsque j’étudiais au baccalauréat au début des années 2000, la seule avenue professionnelle qui nous était présentée, c’était d’aller travailler en agence et d’y faire de l’édition, de l’identité visuelle, du packaging, etc. Depuis ce temps, notre champ d’intervention s’est beaucoup diversifié. Les processus créatifs que nous apprenons et développons peuvent être transférés dans des domaines plus larges. »

De la théorie à la pratique

La profession se déploie aujourd’hui à travers une multitude de disciplines et de modèles de pratique, au point qu’il devient difficile de définir clairement un plan de carrière. Ce constat que fait Stéphane Huot devrait amener les jeunes designers à se questionner avant tout sur le type de pratique professionnelle qu’ils ou elles souhaitent développer, ainsi que sur la nature des projets qui les motivent réellement. Désire-t-on travailler en agence, en collectif, à son compte, ou dans des milieux hybrides, mêlant design et technologie ?

Melissa Reis souligne aussi le fait qu’aider la prochaine génération à s’épanouir ne se résume pas à ce qu’on leur apprend, mais aussi aux ressources auxquelles nous leur donnons accès. Et c’est là que les choses se compliquent. « Nous connaissons tous la valeur des stages et du mentorat, mais la réalité est que de nombreuses entreprises sont à bout de souffle. Entre l’instabilité économique, les lourdeurs administratives et la pression de la performance constante, l’intégration des stagiaires peut apparaître comme un risque supplémentaire que nous ne pouvons pas nous permettre. J’ai accueilli des stagiaires qui n’étaient tout simplement pas prêts ; ils manquaient de curiosité, d’initiative ou du sens des responsabilités. Malheureusement, j’ai été confrontée à ce problème plus souvent que je ne l’aurais souhaité. »

La solution implique peut-être de reconsidérer la formule de stage en créant des modèles complètement repensés. « Ce dont la prochaine génération a besoin, précise Melissa Reis, c’est d’un accès significatif. On pourrait proposer des rôles courts, basés sur des projets concrets, des critiques de design réelles, ou des occasions d’observation qui permettraient aux étudiants de découvrir les coulisses du métier, et ce, sans alourdir les équipes déjà surchargées. »

Vanessa Gaudreau apporte une réflexion qui conclut assez bien cet échange de points de vue. « Je crois qu’il est important de penser le design comme un levier de transformation sociale, écologique ou culturelle. Avec tout ce qui se passe dans le monde actuellement, le domaine de la communication visuelle aura toujours un rôle important à jouer. C’est un outil puissant pour informer, sensibiliser, créer du dialogue et provoquer des changements. »

 

David Kessous – Photo : Alexi Hobbs, Consulat

 

David Kessous, directeur exécutif de création Branding et Design chez LG2, abonde dans le même sens. « Dans un monde marqué par l’incertitude, les marques, les organisations et les collectivités ont plus que jamais besoin de clarté, de cohérence et d’humanité dans leur communication. »

Selon lui, les règles du jeu ont changé : les technologies ont élargi l’accès aux outils, mais elles n’ont pas remplacé la créativité, la vision stratégique, ni la capacité à raconter des histoires. « Ce qui distingue un designer aujourd’hui, conclut-il, c’est sa capacité à comprendre les enjeux, à proposer des solutions pertinentes et à bâtir des récits porteurs de valeur. Le chemin n’est peut-être pas toujours linéaire, mais pour celles et ceux qui cultivent leur curiosité, développent leur pensée critique et abordent leur pratique avec rigueur et authenticité, les possibilités demeurent immenses. »

Notes

1 RGD : Association of Registered Graphic Designers.
2 Storyboard : Représentation visuelle d’une histoire ou d’un récit qui est souvent utilisée dans la production de films, d’animations et de publicités.

 


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