De plus, leur succès vient de la collaboration étroite entre les différents organismes mis en place pour la promotion des métiers reliés aux industries créatives. Montréal est choyée dans ce domaine de par son nombre d’organisations dédiées au design. Par contre, le besoin essentiel d’entraide, entre les différentes associations de design, ne se fait pas toujours, et ce, malgré la volonté de plusieurs de leurs membres. Nous nous retrouvons donc à nous combattre inutilement, au lieu de nous soutenir collectivement. À ce chapitre, je tiens à souligner le travail important de trois entités, de taille et de mission très différentes qui, grâce à leur initiative, commencent à changer les perceptions et dialogues existants : la Factry, le Collectif du design au Québec et la section des arts décoratifs et design du Musée des beaux-arts de Montréal. Tous les trois se distinguent par leur volonté de présenter et de discuter de la créativité québécoise différemment ; ainsi, ils présentent le design comme instigateur de progrès.
Alors quoi faire maintenant ?
Si une comparaison entre ici et les marchés européens peut paraître inégale – ou même injuste – pour certains, il faut se rappeler que quelques-unes de ces villes ont une population comparable à celle de Montréal. Par exemple, Milan ne compte que 1,3 million de résidents, sans compter sa périphérie. De plus, des événements tels que la semaine du design néerlandais, dans son format actuel, n’existe que depuis 2005. Par conséquent, l’argument de la superficie de notre île et le nombre d’années de fonctionnement ne peuvent s’appliquer.
Pour se tailler une place ici et à l’international, il faut que nous réalisions un saut collectif vers le changement et que nous réfutions les commentaires promouvant le statu quo. Aussi, nous ne devons pas chercher à compétitionner avec ces autres villes, mais plutôt utiliser notre propre vocabulaire avec les multiples industries qui peuvent bénéficier de nos connaissances. Notre contexte est unique et il faut le mettre en valeur. Pour ce faire, un programme de communication doit être instauré auprès de la population générale et du gouvernement, afin de démontrer non seulement le talent local incroyable, mais aussi pour mieux comprendre la portée économique de la créativité.
En 1961, le gouvernement du Québec a pris la décision d’investir dans le milieu des arts, avec sa politique d’intégration des arts à l’architecture. Créer afin de « permettre à la population de toutes les régions du Québec de mieux connaître l’art actuel sous ses diverses formes d’expression dans les domaines des arts visuels et des métiers d’art […] Et de participer ainsi à l’enrichissement du cadre de vie des citoyens par la présence de l’art dans les lieux qui ne sont habituellement pas réservés à cette fin 2 », cette loi a permis la création de plus de 3 700 œuvres. Une telle initiative, pour l’industrie du design, aurait des retombées importantes au niveau macroéconomique et microéconomique, même si le ministère de la Culture et des Communications propose moins que l’utilisation du 1 % budgétaire actuel de construction. Au niveau social, nous pourrions familiariser une plus grande population aux bénéfices du design et de sa valeur ajoutée pour tous. Le design, sous toutes ses formes, a le potentiel de devenir un enjeu économique non négligeable, et il temps que les différents paliers gouvernementaux le considèrent dans leur stratégie d’innovation.
Le parcours vers une plus grande reconnaissance du design à travers la province, et même à l’échelle mondiale, commence par le dynamisme des différents membres de cette communauté effervescente, mais surtout par celui des responsables des différentes organisations de design. Le progrès ne se manifeste pas uniquement au niveau technologique, mais aussi par la volonté de ses leaders. Ces personnes doivent prendre le pouls de la communauté et être prêtes à céder leur place, lorsque le moment propice arrive. La génération actuelle de jeunes créateurs pense différemment. Elle est sans peur et n’adhère pas à la vision traditionnelle de l’industrie. Il est peut-être temps de lui donner une plus grande voix à la table décisionnelle.