La résilience de chacun des systèmes ne suffit pas à garantir la résilience l’ensemble des systèmes et de leurs interactions. Il faut reprendre la trilogie acceptation, conséquences, planification et l’appliquer à l’ensemble des systèmes en considérant leur interdépendance. « Il y a beaucoup d’analyses des risques, mais il faut faire une analyse de tout ce qui se fait entre les différentes organisations. On ne regarde pas l’interconnexion entre les réseaux et on ne se parle pas », regrette Benoît Robert. Selon lui, il y a un manque de collaboration et de transfert d’information entre les systèmes essentiels.
Dans les années 2000, le Centre risque & performance a fait l’expérience de réunir des représentants d’Hydro-Québec, de Bell Canada, de Gaz Métro, du ministère des Transports du Québec, de l’ancienne Agence métropolitaine de transport, de la Ville de Montréal et de la Ville de Québec. L’objectif, explique Benoît Robert, était de comprendre les interdépendances entre ces réseaux et d’amener chaque réseau à penser sa résilience en fonction des autres. « Quelle ressource utilisez-vous ? Et si elle est manquante, au bout de combien de temps vous ne serez plus capable de fournir votre service ? » illustre-t-il. Le défi est ensuite de maintenir cet espace de collaboration pour planifier la résilience des systèmes interconnectés.
Développement durable de la ville intelligente
Envisager la ville durable sous l’angle de la résilience des systèmes essentiels est complexe, mais la difficulté monte d’un cran si on l’intègre à l’aménagement de la ville ou du territoire. « Est-ce que les décisions urbanistiques peuvent avoir des conséquences sur les systèmes essentiels et leur rétablissement en cas de défaillance ? » s’interroge Benoît Robert. Le territoire n’est en effet pas sans incidence sur la vulnérabilité des infrastructures. Par exemple, que vaut la résilience d’un système essentiel bâti dans un îlot de chaleur ou une zone inondable ? Benoît Robert transporte la réflexion au niveau des quartiers qui se développent selon le principe TOD (Transit-oriented development). Le système de transport en commun en est une épine dorsale et, par là même, une vulnérabilité. « Quand on planifie la construction d’un TOD, est-ce qu’on regarde les dépendances et les vulnérabilités des systèmes ? Est-ce qu’on regarde les conséquences si un système devient défaillant ? Est-ce qu’on intègre une planification pour résoudre une perturbation ? » questionne-t-il en rafale.
Mais ce qui le préoccupe encore plus, c’est la ville intelligente qui repose sur les technologies numériques et de l’information (TIC). Les systèmes essentiels deviennent alors tributaires des réseaux et des technologies de télé communications, qui deviennent alors particulièrement essentiels. « On crée une vulnérabilité. On parle de ville intelligente, mais personne ne regarde ce qui se passe en cas de panne des réseaux de télécommunications », constate Benoît Robert. Il y a là une réflexion à amorcer, estime-t-il, pour considérer une possible défaillance des TIC et, a fortiori, ses conséquences, ce qui ramène au premier indicateur de la résilience : accepter la défaillance des TIC. Car, la ville intelligente ne sera pas durable sans planifier la résilience des réseaux de télécommunications en interaction avec les autres systèmes essentiels.