Yves-Marie Abraham reconnaît toutefois que les certifications qui font appel aux technologies passives, comme le solaire passif ou la ventilation naturelle, vont dans la bonne direction. « On est dans des solutions low-tech par opposition aux solutions high-tech, convient-il. En revanche, ces techniques seront-elles accessibles au plus grand nombre ou seront-elles réservées, comme beaucoup de solutions vertes, aux gens qui ont les moyens de se les payer ? »
Selon lui, une solution serait selon lui d’opérer une rupture de nos modes de production et de consommation qui passerait par les communs, c’est-à-dire des institutions collectives fondées sur le partage de moyens d’existence et gérées de manière démocratique dans une perspective d’autosubsistance, un concept décrit également par le terme mutualisation par Marika Frenette, architecte et urbaniste, présidente de Wigwam conseil à Nantes. Yves-Marie Abraham cite le cas de Wikipédia, un commun numérique dont personne n’est propriétaire et dont les utilisateurs sont aussi les producteurs. Plus concrètement, il cite encore le Bâtiment 7. Cet ancien bâtiment du CN a finalement été cédé au milieu communautaire du quartier qui y a installé une épicerie, une microbrasserie et plusieurs ateliers de réparation et bricolage. L’épicerie est autogérée par les clients qui mettent aussi la main à la pâte pour la faire fonctionner.
Appliqué au bâtiment résidentiel, le commun peut prendre la forme du cohabitat, constitué d’unités d’habitation privées et d’espaces partagés. Ensemble, les futurs habitants décident des besoins à satisfaire et participent avec des professionnels à la conception du bâtiment. Il est de taille modeste et sobre en technologie dans un souci d’économie des ressources, mais aussi dans un objectif de réappropriation de l’habitat. « Reprendre le contrôle sur la façon de satisfaire nos besoins suppose des technologies simples et donc appropriables, pas au prix de dix ans d’études, et des matériaux accessibles localement », justifie Yves-Marie Abraham. Le cohabitat ne demande pas à chacun de savoir tout faire pour être autonome dans l’entretien de son logement. Il suppose au contraire entraide et participation de tous pour qu’ensemble les habitants se réapproprient la conception, la gestion et l’entretien de leur habitat.
Cette perspective des communs peut paraître utopiste, mais l’est-elle plus que celle d’une croissance infinie dans un monde fini ?