Le Code de l’énergie s’est alors beaucoup intéressé à la performance des bâtiments, cela principalement du point de vue des pertes thermiques. « Dans les années 1970, avec la crise énergétique, on faisait très attention à ajouter de l’isolation, mais les parois se sont refroidies, ce qui a créé des problèmes de condensation, explique M. Maref. Ils ont réglé les problèmes de condensation et c’est l’étanchéité à l’air qui est venue. Maintenant, c’est l’étanchéité à l’eau qui viendra. » C’est donc une succession de résolutions de problèmes qui s’est accumulée avec les décennies.
La prochaine étape, celle de la résilience, est très importante, poursuit M. Maref. « Les performances prédites ne se matérialisent pas, et donc les économies d’énergie. » Les chercheurs universitaires, et ceux des différents centres et groupes de recherche se sont rendu compte que la modélisation ne correspond plus à la réalité à laquelle le bâtiment est soumis. Les variations de conditions climatiques peuvent être très grandes sur une courte période, ce qui cause des effets non prédits pour les composantes de l’enveloppe du bâtiment ainsi que les systèmes muraux. Pour comprendre comment les constructions réagiront aux conditions climatiques modernes, « il faut regarder de l’échelle des matériaux jusqu’à l’échelle du bâtiment », précise-t-il.
Il y a maintenant de nouveaux types d’essais pour mieux comprendre ces nouvelles réalités. Par exemple, il y a aujourd’hui des tests d’arrachement de toit parce que c’est un problème qui survient plus souvent et qui doit être considéré en conception. Selon M. Maref, le gros défi sera la préservation des bâtiments patrimoniaux et existants. Comment consolider les bâtiments déjà en place pour qu’ils résistent à la nouvelle réalité à laquelle ils sont soumis ? Mis à jour tous les cinq ans, le Code du bâtiment tentera de répondre de plus en plus à cette question. Cependant, émettre de nouvelles normes et réglementations est laborieux ; par exemple, en 2024, c’est le Code du bâtiment 2030 qui est en réflexion. De plus, le Québec applique souvent cette réglementation des années plus tard. Dans ses mises à jour, le nouveau Code de l’énergie a intégré les ponts thermiques, tel que le guide des ponts thermiques de la Colombie-Britannique. L’ASHRAE l’a adopté dans sa norme 90.1.
La conception doit prioriser la performance de l’enveloppe pour minimiser les systèmes mécaniques, note M. Maref. En suivant le CNB et le CNÉB, c’est seulement la performance énergétique qui est en jeu, mais il faudra éventuellement intégrer la résilience des bâtiments contre les intempéries. La « physique du bâtiment », comme on le dit en Europe, doit considérer l’ensemble du bâtiment depuis la structure en passant par les systèmes de climatisation, ventilation et chauffage jusqu’à l’enveloppe dans son intégralité.
Quoi retenir ?
D’abord, il y a une prise de conscience de l’ampleur des défis apportés par la nouvelle réglementation et les nouvelles conditions météorologiques. La conformité au CNÉB 2015 modifié pour le Québec apporte une efficacité énergétique pertinente en cette période de changements climatiques. Il y a aussi un important contrôle de coûts à faire pour répondre aux normes et conserver l’attrait pour les entrepreneurs de construire. Les mesures incitatives gouvernementales veillent à garder cet intérêt. Finalement, la simulation est complexe, mais tout un lot de solutions commence à émerger autant par les professionnels, ingénieurs et architectes, que par les fabricants pour simplifier la conformité en période de conception et à la construction. Nous avons donc des acteurs innovateurs qui se montrent capables de relever les défis qui nous attendent.