Les propriétés de l’asclépiade
La fibre d’asclépiade, issue du fruit de la plante d’asclépiade, originaire d’Amérique du Nord et plus particulièrement du Québec, pousse facilement sur des sols moins propices pour des cultures exigeantes, et nécessite très peu d’intrants et aucune irrigation.
Elle est donc une alternative intéressante aux autres fibres naturelles, en raison de sa nature hypoallergénique, de sa faible densité, et de sa paroi lisse qui lui confère un toucher doux. C’est pour cette dernière caractéristique qu’est venue l’idée de développer des revêtements isolants à base d’asclépiade pour l’intérieur des automobiles. En effet, en plus d’être douce, elle possède également d’excellentes propriétés d’isolation thermique et acoustique du fait de sa structure creuse. Cependant, comme toutes les autres fibres naturelles, elles présentent certaines irrégularités morphologiques qui se traduisent par de faibles propriétés mécaniques.
Structure creuse de la fibre d’asclépiade (observée au microscope électronique à balayage) – Source : Université de Sherbrooke.
C’est donc pour valoriser tous ces atouts que, sous la supervision du professeur Mathieu Robert, titulaire de la Chaire de recherche du Canada sur les écocomposites polymères, que j’ai développé des non-tissés à isolation thermique et acoustique à partir de la fibre d’asclépiade.
Le procédé
Comment définit-on un non-tissé ? C’est un voile de fibres qui est obtenu en mélangeant plusieurs fibres qui sont liées entre elles par différents moyens d’assemblage, hormis le tissage, le tricotage ainsi que la couture traditionnelle.
Il y a déjà eu de nombreuses recherches sur l’asclépiade, mais au laboratoire de l’Université de Sherbrooke, nous privilégions un procédé qui est non agressif pour la fibre, ce qui lui permet de conserver intégralement sa structure et, par conséquent, ses propriétés. À notre connaissance, nous sommes un des seuls laboratoires à utiliser cette technique pour fabriquer des non-tissés à base d’asclépiades. De plus, afin de pallier ses faibles propriétés mécaniques, on la mélange avec une autre fibre, la fibre d’acide polylactique (PLA). Il s’agit d’une fibre biodégradable, compostable qui est issue de l’amidon de maïs. Ainsi, nous pouvons obtenir des non-tissés dont la masse surfacique varie de 40 g/m2 à 2000 g/m2 et de différentes épaisseurs allant de quelques millimètres à 200 millimètres.
Les propriétés des revêtements à base d’asclépiade
Les principales fonctions d’un revêtement d’intérieur de voitures sont l’isolation thermique, acoustique et l’esthétique. Nous avons donc caractérisé l’isolation thermique et acoustique de nos non-tissés. La conductivité thermique qui correspond à la capacité d’un matériau à permettre ou non le transfert de chaleur est un paramètre important dans les matériaux d’isolation. Plus elle est faible, plus le matériau est isolant et inversement, plus elle est élevée, plus le matériau laisse passer la chaleur.
Elle a été calculée pour tous les revêtements selon la norme ASTM C518. Nous avons obtenu des valeurs en dessous de 32,55 mW/m.K pour nos non-tissés. Nos valeurs sont deux fois inférieures à celles de revêtements faits de fibres de coton et synthétiques, donc nos revêtements sont plus isolants.
Revêtements isolants en asclépiades et PLA – Source : Coopérative Monark.
Le coefficient d’absorption du bruit est également un paramètre crucial pour les revêtements. Plus il est proche de 0, plus les ondes sont réfléchies, alors que plus il est proche de 1, plus les ondes sont absorbées et meilleure est l’isolation. Il se calcule à l’aide d’un tube d’impédance selon la norme ASTM E-1050 pour une plage de fréquences allant de 250 Hz à 4500 Hz. Les résultats nous ont montré que tous nos non-tissés ont des valeurs de coefficient d’absorption entre 0,7 et 0,9. Ils absorbent donc le bruit.
Nous avons démontré qu’en plus d’être biodégradables, compostables et doux, nos revêtements isolants pour automobile à base d’asclépiade et de PLA ont toutes les propriétés requises pour être performants. Ils peuvent également être utilisés comme revêtements dans d’autres domaines tels que le ferroviaire, l’aéronautique. Nous pourrions assister dans quelques années à une émergence des non-tissés biosourcés utilisant la fibre d’asclépiade dans de nombreux domaines d’activité.
Notes
1 Normand, X. Recycling of automotive textiles. Text. Adv. Automot. Ind. 2008, 86–109.doi:10.1533/9781845695040.
2 Smith, C. Nonwovens in automotives-more than just a pretty face. Int. Nonwovens J. 2004, 3, 60–63.