Les discussions autour d’une filière des écomatériaux ont pris de l’ampleur à l’occasion des premières éditions du Rendez-vous des écomatériaux dans les années 2015 à 2018. La curiosité de cette nouvelle forme de collaboration intersectorielle était palpable. Les premières éditions du Rendez-vous ont rassemblé des acteurs de qualité, des précurseurs, des innovateurs, qui avaient le goût de contribuer à l’essor d’un nouveau créneau économique au Québec. Cet événement a permis d’amorcer des discussions qui n’auraient peut-être pas eu lieu autrement. C’était l’occasion pour plusieurs d’avoir un espace d’échange pour rêver à la transposition d’idéaux environnementaux dans les processus constructifs des bâtiments qui habilleront notre territoire québécois pour au moins une centaine d’années.
Tranquillement, les écomatériaux se sont imposés dans les programmes de financement. Cette thématique a été reprise dans les agendas de plusieurs colloques des différentes régions et dans les activités d’institutions de recherche et d’innovation. Les matériaux biosourcés et issus de la valorisation de matières résiduelles ont convaincu de leur pertinence dans les efforts de réduction des gaz à effet de serre. Les premières entreprises industrielles dans ce créneau ont pris leur essor. Elles ont appris des projets artisanaux qui étaient déjà en activité et se sont butées aux processus d’homologation qui ne sont pas encore adaptés à ce courant constructif en émergence.
Les premières entreprises industrielles dans le créneau des écomatériaux ont pris leur essor. Elles ont appris des projets artisanaux qui étaient déjà en activité et se sont butées aux processus d’homologation qui ne sont pas encore adaptés à ce courant constructif en émergence.
Les dernières années ont été plus difficiles pour la filière des écomatériaux. L’intérêt pour ce créneau s’est maintenu et différentes petites initiatives ont continué de naître. Toutefois, le poids de ce secteur économique reste encore marginal à l’heure actuelle. Sa faiblesse ? Elle se qualifie en trois causes. D’abord, la filière n’est pas organisée. Une multitude d’initiatives, de champs de recherche et de mesures de soutien à l’innovation ont émergé, mais aucun regard complémentaire, en écosystème, n’a été centralisé. Le gouvernement du Québec, notamment par le ministère de l’Économie, étant absent de leadership, il revient donc aux acteurs de la filière de s’organiser. Toutefois, comme il s’agit d’un créneau en émergence et non structuré, il existe peu d’organisations à même de proposer une ressource dédiée à cette fédération et suffisamment neutre pour rallier les parties prenantes dans un esprit de collaboration et non de compétitivité. C’est cette occasion de discussion, d’association autour d’avancées communes, qu’a tenté de réaliser la MRC des Sources en maintenant le Rendez-vous des écomatériaux chaque année depuis sa création.
La deuxième cause de ce lent déploiement vient de la demande. Contrairement à la France qui a adopté sa Stratégie Nationale Bas-Carbone (SNBC) proposant une trajectoire claire pour la réduction des GES, notamment par la modification des exigences constructives des bâtiments gouvernementaux, le Canada reste peu commis comme acteur suscitant l’emploi des écomatériaux. Même chose au Québec. L’utilisation des matériaux à faible empreinte carbone est considérée comme une avenue à explorer pour l’atténuation des changements climatiques dans le Plan pour une économie verte 2030, mais cette avenue n’est pas arrimée concrètement à l’intégration de clauses spécifiques aux nouvelles constructions.
Il revient donc aux constructeurs privés et aux citoyens de susciter une demande suffisante pour alimenter un marché de production d’écomatériaux viable.
Source : MRC des Sources – Rendez-vous des écomatériaux
La troisième cause identifiable de la faible croissance des écomatériaux dans les dernières années est attribuable à la disponibilité d’équipements spécialisés. D’une part, la production de matière biosourcée doit naître de l’implantation de nouvelles cultures agricoles. Pour y arriver, il faut développer le savoir-faire agronomique entourant ce type de production et acquérir la machinerie nécessaire à sa récolte. Des expériences réalisées dans la MRC des Sources ont montré de nombreux défis mécaniques. D’autre part, une fois la matière récoltée, il faut en extraire de la fibre de qualité. Actuellement, au Québec, il n’y a pas d’équipement de préparation de matière de gros volume permettant de fournir une production industrielle. Un obstacle pour les jeunes entreprises qui se lancent dans les écomatériaux ou pour les entreprises en activité qui souhaitent s’approvisionner en matière première québécoise.
La preuve n’est plus à faire du rôle significatif que peuvent jouer les écomatériaux comme levier d’atténuation des changements climatiques. Mais cette jeune filière a besoin de s’organiser pour s’imposer dans les choix gouvernementaux et pour faire atterrir des solutions aux freins de son plein déploiement. Il s’impose que des ressources humaines y soient consacrées, que des groupes de travail soient créés et que les idéaux à l’origine de l’émergence de ce créneau soient consciemment transmis et intégrés par les donneurs d’ordres publics.